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Philippe Couve

Arrêt sur images: entreprise privée pour «service public»?

Née à la télévision, l’émission Arrêt sur images s’est perpétuée sur le web en développant une large communauté d’abonnés attentive au décryptage des médias. Son modèle économique est d’une grande simplicité: les seules ressources sont celles issues des abonnements. Pas de  publicité, ni de subvention qui risqueraient de modifier la relation nouée avec les abonnés, explique le fondateur du site, Daniel Schneidermann. Après trois ans d’existence, l’entreprise semble avoir trouvé un équilibre qui reste « fragile ».

Daniel Schneidermann, le fondateur d'Arrêt sur images

Certaines aventures naissent comme des colères. Arrêt sur images appartient à cette catégorie. L’entreprise et le média en ligne ont surgi de la fureur de voir l’émission de télévision éponyme supprimée des antennes de la télévision publique dans la foulée de l’élection de Nicolas Sarkozy au printemps 2007.

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Revue XXI : un pari réussi sur la « valeur » du journalisme de récit

Au départ, c’est un rêve de journaliste : un média qui ne proposerait que de longs reportages sur des sujets qui ne font pas nécessairement la une de l’actualité. A l’arrivée, c’est l’une des réussites les plus inattendues de la presse française.

Patrick de Saint-Exupéry, co-fondateur et directeur éditorial de XXI (Photo: Philippe Brizard via Wikimedia)

A première vue, il est assez difficile de définir l’objet XXI. Pour ce qui est du contenu, c’est du reportage en texte, en photos ou en bandes dessinées. Pour le reste, le mot « revue » s’est finalement installé en dépit des réticences initiales d’une partie de l’équipe fondatrice.

En termes techniques, on parle d’un « mook », à mi-chemin entre le magazine et le book (livre). « Magazine » pour la périodicité (trimestrielle) et « book » pour le format, le prix (15 €) et la vente en librairie. Si XXI n’est pas l’inventeur d’un genre né au Japon, c’est la revue qui a véritablement popularisé le concept en France.

Un projet éditorial radical

Et pourtant, le projet d’origine n’était pas exactement celui-là. Deux moments-clefs ont marqué la naissance de la revue XXI. Le premier lorsque les fondateurs (Patrick de Saint-Exupéry et Laurent Beccaria) ont décidé de renoncer à lancer un mensuel dans des kiosques déjà sur-encombrés. Il leur aurait fallu en vendre 100 000 exemplaires pour atteindre l’équilibre financier en tablant sur une dizaine de pages de publicité par numéro. XXI sera donc un trimestriel sans pub distribué en librairie.

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Congo Blog Ba Leki : réinventer le journalisme et son économie au Congo

Né d’un blog en 2005, le projet Congo Blog Ba Leki animé par Cédric Kalonji est devenu un média avec une rédaction de 8 journalistes et 5 dessinateurs de presse disséminés à travers ce pays grand comme quatre fois la France. Objectif : renouveler le journalisme tel qu’il se pratique dans le pays. Nécessité : trouver des ressources économiques au delà des subventions qui ont permis au projet de voir le jour.

Déclaration d’intérêt: Cédric Kalonji, dont il est largement question ici, est un ami. Nous avons collaboré à RFI pour l’Atelier des médias et nous avons imaginé ensemble Mondoblog (une plateforme pour 100 jeunes blogueurs francophones directement inspirée de son expérience).

Créer un média en République démocratique du Congo lorsque l’on n’est ni homme d’affaires, ni homme politique tient quasiment du miracle ou du concours de circonstances.   Au début des années 2000, le développement des blogs et le raccordement à internet de Kinshasa ont permis à Cédric Kalonji de se lancer dans l’aventure.

Cédric Kalonji (Photo: Etienne Deschaseaux / Le Blog à Papa)

Au départ, l’étudiant en informatique se passionne pour les nouvelles technologies et il décide de frapper un jour à la porte de Radio Okapi (la radio des Nations unies dans le pays) pour y proposer une émission sur les usages du web. Il convainc et débute sur les ondes.

Un regard bienveillant sur la débrouille quotidienne des habitants du pays

Rapidement, profitant d’un accès privilégié au Net, d’un appareil-photo et d’un badge « Nations Unies » qui lui permet de se déplacer plus facilement dans ce pays grand comme quatre fois la France, Cédric Kalonji crée un blog en septembre 2005. Il y publie de courts textes et surtout des photos de la vie quotidienne; une petite révolution dans un pays où le souvenir de l’interdiction de photographier dans la rue (en vigueur sous le règne de Mobutu) reste très vivace.

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Allafrica.com: agrégateur d’infos africaines depuis l’an 2000

Avec deux millions de visiteurs uniques par mois, allafrica.com est le principal média africain en terme d’audience sur le web, ce qui lui a valu d’être choisi par Barack Obama pour une interview exclusive à la veille de sa première visite officielle en terre africaine. L’entreprise agrège le contenu des journaux du continent et le distribue sur le web tout en développant d’autres activités (vente de technologies et gestion de projets web pour des organismes philanthropiques). Co-fondateur et cheville ouvrière d’allafrica.com, le Sénégalais Amadou Mahtar Ba marche, à sa manière, dans les pas de son oncle qui fut directeur général de l’Unesco.

Amadou Mahtar Ba, le PDG d'allafrica.com

Les bonnes idées viennent souvent de loin. L’entreprise allafrica.com n’échappe pas à la règle. Né en 2 000, le plus grand diffuseur d’informations africaines à travers le monde plonge ses racines loin dans l’histoire et la généalogie de son initiateur, Amadou Mahtar Ba.

Pour comprendre allafrica.com, il faut remonter aux années 1970. A cette époque, au Sénégal, le jeune Mahtar  suit à distance les «aventures» de son oncle dont il porte le prénom et qui dirige l’Unesco. Au poste de directeur général de l’organe de l’ONU pour l’éducation, la science et la culture, Amadou Mahtar M’Bow mène le combat pour un Nouvel ordre mondial de l’information et de la communication (Nomic).

Faire entendre la voix de l’Afrique

L’enjeu est simple: les pays du Sud (on dit encore du «tiers monde») qui viennent de se libérer de la colonisation n’entendent pas se faire submerger par les médias occidentaux et subir une nouvelle forme de colonisation douce (que l’on appelle pas encore «soft power»). L’oncle du jeune Mahtar est à la pointe de ce combat diplomatique épique qui conduira les États-Unis à quitter l’Unesco en 1985.

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Suite101 : des articles rémunérés selon leur performance publicitaire

Suite101 sélectionne des auteurs (souvent d’ex-journalistes) et leur propose de publier leurs articles sur sa plateforme. La rémunération ? Incertaine et souvent symbolique car basée sur les revenus publicitaires générés par les articles. L’entreprise, elle, va bien. Merci.

(photo: OndraSoukup via Flickr)

Suite101 est un objet médiatique particulier : pas de rédaction constituée mais des «auteurs» disséminés à travers le monde; quelques éditeurs pigistes qui travaillent également à distance; et une poignée de salariés dont quelques journalistes dans les bureaux de l’entreprise. C’est une société de l’ère post-Google et l’un des 100 sites les plus fréquentés par les internautes américains.

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France: les aides à la presse n’ont pas favorisé le développement d’entreprises viables

L’AFP a lu le rapport que le consultant (et ancien patron d’Arthur Andersen) a remis aux ministres du Budget (François Baroin) et de la Communication (Frédéric Mitterrand).

Le rapport « propose de conditionner les aides de l’Etat à la presse, évaluées à plus d’un milliard d’euros par an, à une stratégie d’innovation et de maîtrise des coûts des journaux, afin de sortir le secteur d’un « système d’assistance respiratoire permanente ».

Ci-dessous le rapport mis en ligne par Vincent Truffy de Mediapart.

20100908_rapport Cardoso Final

Nicolas Voisin (PDG de 22mars & directeur de la publication de Owni.fr): journaliste ou entrepreneur ? [vidéo]

« Bienvenue dans la soucoupe ! ». Nicolas Voisin est manifestement heureux d’accueillir les visiteurs dans les locaux de 22mars et d’Owni.fr. 22mars, c’est la maison-mère, une société que son PDG-fondateur définit comme un « éditeur de médias sociaux ». Le site web de l’entreprise précise:

Nous sommes une société de conseil en stratégie éditoriale on-line, de formation et de développement web & multimédia.
Nous concevons, animons et développons des médias et réseaux sociaux, des plateformes de blogs, sites et webTV ainsi que des programmes d’information et des magazines “cross-médias” pour internet, la TV et le mobile.
Nous accompagnons également des médias, des réseaux (grandes écoles, monde du livre et de la culture..), des marques et des institutions dans leurs stratégies éditoriale on-line, sur le long terme.

22mars, c’est la face la moins visible de la « soucoupe », mais c’est celle qui gagne de l’argent et finance Owni.fr (un média « non profit » pour reprendre la formulation de Nicolas Voisin). C’est sur Owni.fr que s’élaborent également les prototypes de data-journalism que 22mars commercialise ensuite.

Ce modèle hybride société commerciale + média sans but lucratif est suffisamment original pour susciter une série de questions que j’ai posées à Nicolas Voisin (voir la vidéo ci-dessous enregistrée le 18 juin 2010).

Nicolas Voisin, PDG de 22mars et directeur de la publication de Owni.fr from Philippe Couve on Vimeo.

Full disclosure / déclaration d’intérêt

Cette interview et l’étude du cas d’Owni.fr constituent l’un des éléments constitutifs du rapport  » Quel est l’impact déontologique des nouveaux modèles économiques des médias ? ” actuellement en préparation. Le co-auteur de ce rapport, Nicolas Kayser-Bril, travaille pour Owni.fr et il est l’un des associés minoritaires de 22mars, la société qui édite Owni.fr.

Des médias sans but lucratif aux Etats-Unis

La Knight Foundation américaine vient de mettre en ligne le compte-rendu écrit et les vidéos d’une table ronde organisée en avril dernier sur la question (et le modèle) des médias à but non lucratif (non profit).

Les médias dont il est question sont:

S’ils sont sans but lucratif, ces médias n’en sont pas moins des entreprises et spécifiquement des start-ups qui doivent affronter les défis de la croissance et de la pérennisation de leur activité.

Quel est l’impact déontologique des nouveaux modèles économiques des médias ?

On parle (ici et ailleurs) des nouveaux modèles économiques des médias, de la recherche du business model idéal qui permettra de financer la production et la diffusion d’une information de qualité dans un univers numérique en réseau.

Les expérimentations sont multiples, à travers le monde, de médias gratuits, payants, avec ou sans pub, appuyés sur des microfinancements (crowdfunded), des activités annexes, des subventions, des mécènes, de l’argent public ou privé, etc.

Ces nouveaux modèles économiques doivent-ils nous conduire à réexaminer les questions de déontologie ? Peuvent-ils générer de nouvelles formes de conflits d’intérêt ? Comment garantir le respect d’une déontologie exigeante (en faisant appliquer des codes et des chartes ou en misant sur la transparence) ?

Un rapport en préparation

Ces questions vont être au centre d’un rapport que je vais réaliser avec un jeune journaliste, Nicolas Kayser-Bril, et la collaboration de Marion Senant, autre jeune journaliste installée à Londres.

Ce rapport est initié et financé par l’Alliance internationale de journalistes et l’Initiative pour repenser l’économie, deux organisations issues de la Fondation Charles Leopold Mayer.

  • L’Alliance internationale de journalistes (AIJ) est une organisation à but non lucratif fondée par la Fondation Charles Leopold Mayer qui met en place un espace de débat et d’échange sur les pratiques du journalisme à travers le monde. L’Alliance qui réunit des professionnels de l’information et leur public vise à identifier et promouvoir les bonnes pratiques dans une optique de responsabilité sociale des journalistes et plus largement de responsabilité des médias envers la société.
  • L’Initiative pour repenser l’économie (IRE) a été initiée et soutenue par la Fondation Charles Léopold Mayer. L’IRE a pour mission de favoriser l’émergence de nouvelles propositions dans le domaine économique.

Ces deux organisations entendent aujourd’hui prolonger le travail approfondi sur les questions de l’éthique journalistique et de la formation des journalistes effectué par l’AIJ. Elles constatent que les r/évolutions en cours dans le monde des médias -et notamment la remise en cause brutale des modèles économiques existants- sont en train de créer des conditions nouvelles d’exercice de la profession de journaliste. L’occasion de s’interroger sur l’impact que ces nouvelles conditions économiques auront sur les questions d’éthique et de déontologie.

Modèle économique et déontologie : 30 médias passés au scanner

Dans les semaines qui viennent, nous allons interroger une trentaine de médias (en Europe, en Amérique du Nord et en Afrique) sur la manière dont ils abordent ces questions. Quelques entretiens ont déjà commencé et je tiens à remercier tous ceux qui acceptent de jouer le jeu de la transparence pour ce travail qui n’est ni celui de juges, ni celui distributeurs bons points ou d’arbitre des élégances, mais celui de journalistes qui tentent de dresser un état des lieux de la situation et les premiers entretiens nous révèlent que la matière est riche, que l’innovation existe également dans le domaine de la déontologie et que les nouveaux médias sont beaucoup plus ouverts et transparents que leurs aînés.

Vos idées, vos commentaires, vos suggestions

Dans les jours qui viennent, nous allons mettre en ligne sur Journaliste-entrepreneur.com les premiers compte-rendus d’entretiens réalisés dans le cadre de cette enquête. N’hésitez pas à nous faire part de vos commentaires. D’autre part, si certains médias, de par leur modèle économique original ou de par l’attention qu’ils prêtent à ces questions de déontologie, vous semblent particulièrement intéressants, n’hésitez pas à nous les faire connaître.

Publication du rapport final en novembre

Le rapport qui rendra compte de cette enquête sera rendu public en novembre à l’occasion des 4e Assises internationales du journalisme et de l’information qui se tiendront à Strasbourg (Conseil de l’Europe) du 16 au 18 novembre 2010.

[Photo : Cayusa via Flickr]

Adriano Farano (cofondateur de cafebabel.com et consultant médias): journaliste ou entrepreneur ? [vidéo]

Il paraît qu’Adriano Farano est italien. C’est sans doute vrai. Il est aussi et peut-être avant tout européen.

A Strasbourg en 2001, jeune étudiant en année Erasmus, il décide de monter avec une bande de copains ce qui deviendra le premier magazine participatif en ligne européen présent sur le web en 6 langues: cafebabel.com.

Neuf ans plus tard, Adriano Farano décide de vivre de nouvelles aventures professionnelles. Il quitte Café Babel, devient consultant médias, participe à l’aventure d’Owni et finalement décroche une bourse d’étude pour aller passer un an dans la Silicon Valley dans le cadre du programme Knight Fellowship for international journalists. Son sujet d’étude sera: comment favoriser l’émergence en Europe d’une nouvelle génération d’entrepreneur dans le secteur des médias.

Avant de prendre l’avion pour s’installer en Californie avec sa famille, Adriano Farano m’a expliqué dans quel état d’esprit et avec quelle vision de la question des journalistes-entrepreneurs, il partait. Ses réponses en vidéo.

Adriano Farano, cofondateur de cafebabel.com et consultant (journaliste & entrepreneur) from Philippe Couve on Vimeo.