Journalistes-entrepreneurs : les Anglais sans complexes
Dire que monter sa société en Angleterre est bien plus facile qu’en France, c’est un peu enfoncer des portes ouvertes. Des démarches administratives ultra-simplifiées et surtout un système qui ne requiert quasiment aucune mise de fonds initiale font de ce pays un paradis pour entrepreneur, comparé à la France.
Mais au-delà de ces questions « logistiques », l’esprit d’entreprise britannique crée un climat beaucoup plus favorable aux entrepreneurs et les journalistes outre-Manche ne s’y sont pas trompés. A Londres, les forums, conférences et réunions sur ce thème se multiplient et, à chaque fois que je m’y rends, je suis saisie par l’énergie, l’optimisme et la créativité dont fait preuve toute une génération de jeunes journalistes.
Décomplexé et « bankable »
Plutôt que de pleurer la « mort » de leur métier, ils ont choisi de créer une nouvelle façon d’exercer leur profession : décomplexée, innovante et surtout… « bankable ». Ne rêvons pas, il n’y a pas encore de success story à l’américaine dans le monde des médias anglais, mais des projets réfléchis et réalistes commencent à voir le jour.
Peut être est-ce dû au fameux sens du commerce des Britanniques. Ce sont de formidables vendeurs et les journalistes que j’ai rencontré ici n’hésitent pas à se « marketer » eux même. Ils n’ont pas peur non plus de parler d’argent et ont un rapport plus simple au journalisme, considérant leur entreprise pour ce qu’elle est : un business.
Éthique personnelle et honnêteté intellectuelle
Cela n’exclut pas l’éthique et la rigueur, simplement, les journalistes britanniques qui se lancent dans l’aventure ont compris qu’il leur fallait à tout prix diversifier leurs activités. Ils n’hésitent pas à effectuer, parallèlement à leur travail journalistique, des prestations de formation, des animations de conférences ou de tables rondes, voire même, how shocking !, quelques travaux rédactionnels pour la communication.
Ensuite, tout est affaire d’éthique personnelle et d’honnêteté intellectuelle. Mais comme me l’expliquait l’un d’entre eux il y a quelques semaines : « si former des cadres sup à la prise de vue pendant quatre jours me permet de financer un reportage dans un quartier sensible de Manchester pendant un mois ou une enquête au long cours, je ne vois pas où est le problème ? Cela me permet de consacrer vraiment du temps à des sujets qui me tiennent à cœur ».
A l’heure où le bâtonnage de dépêche est en train de devenir la norme dans certains médias, on peut se demander où est la véritable éthique ? Chez le journaliste qui pompe allègrement l’AFP ou chez celui qui est capable de financer lui-même ses projets et n’a pas de compte à rendre à des annonceurs un peu trop envahissants ? Qu’en pensez-vous ?
Vraiment très bon papier. Pour bosser à l’étranger et rencontrer de nombreux grattepapelars britanniques ou américains, je peux d’ailleurs témoigner de leur incompréhension face au dédain avec lequel on considère les « pigistes » en France. Eux préfèrent le « noble » terme de « freelance »…
je crois aussi que ces journaleux sont moins « formatés » à cette recherche de sécurité au travail (un cdi avec un salaire mensuel, concrètement) que nous. Ceux qui sont passés par les écoles de journalisme, où l’on cherche à « caser » les étudiants, peuvent témoigner de cette mentalité !
Bonjour,
Franchement pas d’accord avec ce que vous dites. En fait, je ne comprends pas cette opposition entre « travail de communication » et « reportage d’un mois dans une banlieue » et « bâtonnage de dépêches » et « celui qui finance lui même ses projets »…
Le problème n’est pas là. Le problème, c’est si vous rencontrez un de vos clients (de com) dans un reportage ou papier pour un média. C’est là qu’il peut y avoir conflit d’intérêt ou suspicion d’un conflit d’intérêt de la part des confrères ou du lecteur.
Après, que les anglais savent multiplier les sources de revenu, très bien… Mais voilà, on sait que côté morale / éthique ça peut ne pas être très clair.
Est-ce que la question que vous posez n’est pas celle finalement de la transparence sur les sources de revenus ? Si le clients sont connus, si les « disclaimers » sont présents, les rsiques que vous évoquez ont moins de chance de survenir.